Sans regrets

J’ai pris 3 semaines de réflexion pour revivre cette course et être certain du diagnostic et oui maintenant j’en suis sur, j’ai eu sur cette course plus que ce que j’étais venu chercher, même sans avoir tapé la cloche. Flashback.

Il est 5H, St Jean s’éveille.

Levé vers 5h, avec toute la famille. Il y a encore du monde avec moi aujourd’hui. Mes parents, Ludy, Adrien et Minouche sont venus pour m’encourager. Et ça a commencé dès…la veille !

Je pars au parc à vélo avec mon sac, mes lumières. La nuit est sombre dans les montagne mais la journée s’annonce belle. La température est agréable.

Préparation du vélo. On est 70 dans le parc autant dire rien. Tout le monde est calme et concentré. J’organise mes sacs. Mange un peu de mon cake de petit dej, profite de ce qui se passe autour. Je le sais ici il n’y a pas de calme avant la tempête, car il n’y a pas de tempête. La journée sera juste longue et difficile. Pas de speaker sous amphet, pas de nuées de spectateurs qui encouragent, et même quasiment pas de concurrents. Je suis prêt a passer la journée majoritairement tout seul.

Un peu avant le départ je discute avec mes supporters et me rend compte que j’ai oublié mes sandwichs pour la journée. Ils sont restés dans le frigo. Minouche me file des Snikers qu’elle avait dans son sac. Je les met de côté dans ma veste. Ca servira surement.

6H30 Départ

Le départ est toujours aussi impressionnant.

Nous sommes quelques abrutis pour aller barboter dans une flaque dont on ne distingue pas les bord.

Je rentre dans l’eau pour attendre le départ, on se répartit sur la ligne d’arrivée. L’angoisse est montée d’un cran. Il n’y a plus de retour possible. Un an que je me prépare pour être là, mais pourquoi ?

Le départ est donné avec un fumigène qui éclaire un peu le bassin. Go !

Je commence à nager, prend le temps de regarder bien devant pour distinguer les bouées dans l’obscurité. Je garde le bord droit à bonne distance pour essayer d’avoir un peu de fond. Le niveau du lac est bas. A certains endroits je touche même avec les bras. Certains à coté font du dolphing. Mais surtout, personne n’avance vraiment droit. Je suis en permanence à la recherche d’un repère, mais je n’y voit rien.

A la fin du premier tour, le jour se lève. Je distingue le parc encore éclairé par les gros projecteurs. Je lève un peu plus la tête. Il n’y a pas tant de monde devant.

La nage est propre. J’essaie d’être le plus détendu possible. Je n’utilise pas les jambes du tout. Sur la ligne droite opposée au parc, j’ai le soleil dans les yeux. C’est vraiment con, 500m avant j’avais pas de lumière, maintenant j’en ai trop ! Du coup j’essaie de glaner des repères près de moi. Le deuxième tour se passe bien cependant. Pas de fatigue, je passe devant le parc pour commencer le troisième tour, détendu.

Troisième tour idéal. Les sensations sont bonnes. Je me détends un peu et à l’approche du dernier virage je ralentis un peu. Le groupe s’est étiré. De temps en temps je vois un concurrent, mais pas souvent.

Fin de la nage, je me relève et titube. Ah oui c’est vrai qu’après 1H15 de nage les jambes ont oublié qu’elles existaient. Je me rattrape, me redresse sur les cailloux et aperçoit la famille sur le bord. Ils m’ont repéré aussi et commencent à m’encourager. Je regarde la montre 1H14, j’ai 6mn d’avance sur ma prévision. Adrien me confirme que je suis dans le premier tiers. Je sais que ca ne veut rien dire vu le profil de l’épreuve, mais ça fait du bien quand même ! Minouche cours à coté pour me filmer. Je lui fait un petit signe mais reste concentré.

Elapsed Time Moving Time Distance Average Speed Max Speed Elevation Gain Calories Burned
01:10:51
hours
01:10:51
hours
3,52
km
2:01
min/100m
0:36
min/100m
0,00
meters
735
kcal

Je retire la néoprène et me sèche un peu. Prend le temps d’enfiler mes vêtements par-dessus ma combi. Les poches sont pleines de nourriture et le maillot est un peu lourd. Je lève les yeux, tiens un mec à poil ! Un des participant s’est déshabillé complètement pour se changer. Il n’y a qu’ici qu’on voit ça ! Je mets toutes mes affaires dans le sac dédié, récupère ma puce GPS pour partir. J’ai des téléphone braqués sur moi j’ai l’impression d’être Vincent Luis :-). Kahina filme, crie, court, je grimpe sur le vélo en souriant. sourire crispé, je sais que la natation ce n’était même pas l’échauffement.

Le Vélo : Le Gros morceau

L’échauffement c’est les 5 premiers km de vélo. Parcours plat ou on rattrape la route. Toujours en route ouverte. Malgré l’heure matinale, le trafic est déjà présent. Les voitures se foutent des vélos. Mais bon, je roule en ile de France, l’irrespect des automobilistes je connais ! Je passe à autre chose. Rentrée dans St Jean, tourne à droite, c’est parti pour la grimpette.

Le premier col c’est le petit-dej. Il ne monte pas si haut (600m) et la pente est faible. 20km de montée ou j’avance bien. Les jambes sont bonnes. La voiture passe, la famille crie. Sans y penser, je passe le sommet et entame la descente. Ça descend bien, cette partie de la route est belle, la pente toujours douce. Arrivé en bas, au détour d’un virage, la voiture est arrêtée, j’ai un peu plus d’une heure de route, je fais un stop
pour manger. Je discute un peu et repars pour aller vers Amélie-les-Bains.

Ça remonte un peu, redescend un peu mais ça reste cool. J’arrive dans Amélie, la famille m’a repassé (en criant !) et m’attends près du gymnase ou était le parc il y a deux ans. Je ralentis pour leur annoncer que je ferais un stop à Arles (nouveau parc à vélo).

A cet endroit, le parcours revient sur la D115, une des seules route potable de la région, toujours en route ouverte. Et on va y rester pendant près de 20 Km ! J’arrive vite à Arles, bifurque pour rentrer au parc à vélo. Sur le chemin du gymnase, moins fréquenté, je vois une main dépasser de la voiture avec un paquet avec…mes sandwichs. Ravitaillé en route ! Normalement c’est interdit, mais comme cette course est tarée, on est plus à ça près !

Je repars avec un cuissard plus confortable pour la longue distance. J’ai à priori perdu beaucoup de places sur ce changement. Rien de grave, le classement n’est pas l’objectif.

Retour sur la 115, c’est parti pour un peu moins de 20km de montée douce jusqu’à Prat-de-Mollo. Au milieu des voitures. A partir de là je suis sur le nouveau parcours. C’est compliqué de rouler ici. Je suis à 20km/h de moyenne, les voitures ne nous respectent pas et nous serrent sur le bas-côté. Et à certains endroits, le bas-côté est tapissé de pierres éboulées de la montagne en aplomb. Les véhicules lourds galèrent à nous doubler car la route est sinueuse et cela créée beaucoup d’énervements derrière nous. J’essaie de me concentrer sur autre chose afin de ne pas griller de mental sur l’humeur des autres et les mises en danger que je subis. Aucune trace de l’organisation sur ce secteur. Je pourrais être sur une sortie perso ce serait pareil.

J’arrive à Prat, les accompagnateurs sont là. Ils profitent du soleil dans cette belle ville. Je pensais trouver le dépose sac ici mais ce n’est pas le cas. Il a été déplacé. Je mange un bout de sandwich et vais faire le plein des gourdes sur une des « sources » indiquée par l’organisation. En guise de source ici ce sont des toilettes publiques !

Je repars de Prat bifurque à la sortie du village. Je sais que maintenant j’attaque le premier point dur (!), le premier col qui dépasse 1500m. Au départ ça monte tranquillement, mais la pente augmente vite. Pour l’instant la route est propre, mais je bifurque avant La-Preste-les-bains sur une route beaucoup plus raide et beaucoup plus dégradée. Sur cette route très granuleuse, le vélo ne roule pas et je commence à me fatiguer. Il fait chaud. j’alterne entre ombre et soleil en buvant beaucoup. Je continue de monter, croise ou me fait doubler par des gros 4×4 de chasseurs qui n’en ont rien a faire des vélos. Ils doublent pour s’arrêter juste devant. C’est rageant. J’arrive au sommet, la famille est là à discuter avec la personne de l’orga qui compte les participants qui passent. Ils sont encore de bonne humeur et dansent en me voyant arriver. Je mange un bout et discute 5mn avant de redescendre. Je suis content d’avoir passé la première difficulté. Je suis physiquement bien.

La descente n’est pas agréable mais je sais que j’ai le dépose-sac à la fin de la route de merde. Arrivée à La-Preste-les-bains, le dépose-sac est à côté d’un bar. L’avantage c’est qu’on peut s’assoir et profiter de quelques minutes de repos. Je refais le plein de nourriture, change de lunettes car il fait grand soleil maintenant et vide mes poches de ce qui n’est plus nécessaire. Je ne reste pas longtemps mais ça m’a fait du bien.

Reprise de la descente en traversant le village qui est en fait une station thermale perdue dans la montagne et la foret. Je fais la descente vers Prat à bonne allure mais sans forcer.

Arrivé à Prat, bifurcation vers le col D’Ares, deuxième col à 1500m. Mais celui-là je le connais. Avantage, la route est propre et large. Inconvénient, c’est encore la D115, il y a beaucoup de
voitures puisque c’est la route de l’Espagne. Je monte en suivant mes variables (rythme cardiaque, puissance…). Je commence à voir que j’ai un peu de retard sur mon plan. Pas grave, je monte. Au moins cette année, je vois autour de moi. Il y a deux ans le col était cerné par les nuages.

J’arrive au sommet fait mon demi-tour et m’arrête auprès de la famille qui m’attend en haut. Il fait beau et assez chaud ici. Je prends le temps de manger un peu. On est deux ou trois coureurs à se suivre et on se retrouve ici, chacun avec ses accompagnateurs. Je repars en sachant que je vais pouvoir profiter de la descente. Je sais aussi que ce sera la seule ! Kahina
court a côté pour me filmer en repartant (elle est tarée cette « gamine » !)

Je descends, vite. La route est large, sèche et assez belle. Quelques pointes a plus de 60. Adrien me double a la moitié de la descente et j’essaie de rester dans son sillage. Il accélère plus fort en relance, mais je passe plus vite dans les virages. Je m’éclate !

Retour à Prat, je m’arrête pour refaire le plein. Kahina veut me donner mon dernier sandwich, mais comme il y a du monde, elle applique une technique digne des plus grand James Bond. Elle dépose mon sandwich dans les toilettes publiques et je vais le récupérer ensuite. Ça ne sert
certainement à rien, mais c’est drôle.

Je repars en continuant de descendre sur la D115. La descente est agréable, mis a part les voitures, mais un peu stressante car j’ai besoin de beaucoup d’attention. Et puis je sais que mon 3eme col à 1500 m’attend et que donc plus je descends, plus j’aurais à monter. Je sais aussi que c’est sur cette dernière ascension que j’aurais les plus forts dénivelés.

Je bifurque pour quitter la D115 et commencer à monter et d’entrée ça casse les jambes. Gros dénivelé dès que j’ai quitté la D115 pour traverser un village. Sortie du village, on entre sur une route dégeulasse. Le revêtement est très granuleux, la pente hyper raide. Je suis collé à la
route. En plus la route n’est pas large donc je redoute toute voiture que j’entends arriver derrière moi.

Je m’arrête dans la pente pour manger un morceau, en repartant je n’arrive pas à clipser les chaussures dans les pédales et me vautre lamentablement. Je commence à perdre en lucidité. Ma chaussures gauche à du morfler car même à l’arrêt je n’arrive pas à l’enclencher. Je perds du temps, m’énerve. Je m’énerve de perdre du temps, et je perds du temps parce que je m’énerve. J’essaie de me calmer mais clairement mentalement c’est dur. Je n’avance pas mais je vois l’heure avancer et mon retard augmenter. J’essaie de calculer mon heure d’arrivée au sommet et donc ma fin du vélo, mais toutes mes projections me dépriment.

La famille me double avant d’arriver à Corsavy. Maman me demande si je suis tombé, je ne comprends pas la question tout de suite, j’ai failli lui répondre « non ». Et puis elle me signale que j’ai le coude en sang ! J’avais oublié ! Je m’arrête quelques minutes avec eux. Discuter me fait du bien, dans un sens. J’ai envie de dire à quel point je ne me sens pas bien, mais je n’arrive pas à sortir les mots. C’est vrai j’ai la gorge sèche, mais ce n’est pas ça qui me gêne. Je ne veux pas admettre que je souffre autant. En même temps, eux ils voient ma tête, ils doivent bien se
douter de quelque chose.

A Corsavy, je bifurque pour la dernière partie de la montée. Il me reste 10Km de montée vers le refuge de Batère. Celle-là je la connais car elle faisait partie du parcours il y a deux ans. Sauf que la dernière fois c’était le premier vrai col de l’épreuve. Là c’est le troisième, j’ai 145km et plus de 8h de vélo dans les pattes et je viens déjà de passer 20Km à monter.

En plus, l’état de la route s’est encore dégradé. A un moment donné, il y a un câble électrique en travers de la route. Certainement lié à des orages en début de semaine. Mais merde, à quel moment on envoi des coureurs là-dessus. L’énervement prend le pas sur la frustration et
sur la fatigue. Bizarre aussi, je ne vois pas la voiture suiveuse. Donc je grimpe seul, le soleil commence à descendre derrière la montagne et il fait moins chaud.

J’arrive au dernier virage, je sais que la dernière ligne droit monte à 20%. Je me hisse sur mes jambes pour passer en danseuse mais j’ai mal. Dernier effort, j’arrive au refuge, dans ma tête le
calvaire est fini. Il ne me reste plus qu’à descendre sur 25km de route gravillonnée. Je bois un coup vite fait, remplis une gourde au cas où et commence la descente.

J’ai un peu les jambes raides et ai du mal à m’engager dans les virages. Le pilotage n’est plus fluide et je me fais peur deux ou trois fois car j’ai l’impression de déconnecter. Certains virages me sautent littéralement au visage, je n’ai plus la lucidité suffisante pour rester concentré. En serrant plus fort le guidon pour garder mes trajectoires, je ressent la blessure de mon coude. Lui aussi est raide. Je descends sans prendre de risque. Ce qui n’est pas forcément évident sur cette route. Dans la descente je croise les quelques coureurs qui restent derrière moi. Un est même en train de monter à pieds !

Je repasse Corsavy, prend à gauche pour redescendre vers Arles. De fait cette route est plus fréquentée. Une camionnette en sens inverse me balance des gravillons dans un virage. Je peste encore sur cette organisation défaillante et sur les routes pyrénéennes. Les freins commencent à souffrir aussi, ils couinent de plus en plus.

J’arrive dans Arles et ralentit le rythme puisque je peux croiser une voiture ou un piéton a chaque virage. Les doigts sont douloureux aussi à force de freiner. Il n’y a plus rien qui va. Je fais l’inventaire des douleurs. Le pied gauche, les jambes entières, le dos, un coude, les mains, les épaules, la nuque. Il faut que je pose le vélo et que je change les chaines musculaires sollicitées sinon je risque de craquer.

Ca y est, je tourne pour rejoindre le gymnase, un coup de cul à grimper encore et ensuite je peux descendre du vélo. La descente du vélo n’est pas très conventionnelle. A ne pas montrer dans les écoles de triathlon ! Je déclipse juste les deux pieds et tends les jambes des deux côtés du vélo. Les deux pieds au sol, je prends quelques secondes pour apprécier les encouragements de la famille qui me félicite pour le parcours vélo.

Elapsed Time Moving Time Distance Average Speed Max Speed Elevation Gain Calories Burned
11:26:25
hours
10:23:09
hours
180,09
km
17,34
km/h
69,90
km/h
4 376,00
meters
4 722
kcal

Ils m’annoncent que ma balise GPS est HS et que l’organisation m’en a préparé une nouvelle. Ils me disent aussi que vu l’état et la largeur de la route pour rejoindre Batere, ils ont préféré ne pas me suivre de peur de prendre un concurrent sur le capot. Ils ont eu raison, mais c’est dingue de devoir en arriver là. Tout ça cumulé me fait remonter toutes les fois où je me suis dit pendant la course « là c’est limite ». Je rumine. « Mais si l’orga se fout du fait que ma puce n’émet plus, à quoi elle sert. Si j’avais été dans un ravin, qui s’en rendait compte ? » Je rumine en écoutant ma famille qui me parle. J’entends les encouragements, mais de loin.

Je rentre dans le gymnase donne mon vélo a un organisateur et part m’assoir sur ma chaise. Je trouve la nouvelle puce sur ma chaise, mais personne de l’organisation ne m’explique pourquoi. Encore une fois, si j’étais reparti sans la nouvelle puce, personne ne savait que j’étais
reparti. Je suis assez raide, je m’assoupli un peu pour pouvoir atteindre mes pieds et retirer mes chaussures. Je grignote, regarde autour de moi. L’ambiance est calme ici, presque intime. D’autres coureurs du full sont là aussi sur leurs chaises. Ça discute un peu. Il y a aussi des coureurs du half qui ont fini.

Je prends mes vêtements pour aller me changer au vestiaire. Deux coureurs du half se racontent leur course en prenant leur douche. Je marche un peu en tirant sur les jambes. Je reviens à ma chaise, rempli mon sac avec ce que j’ai besoin. Une frontale, a manger, les gourdes, un coupe-vent et je ressors.

Je retrouve la famille qui m’attend à la sortie du gymnase. Je prends un peu de temps pour rigoler avec eux. Ça me fait du bien. Je discute horaires, première boucle, seconde boucle. Je commence à accélérer la marche pour me lancer, Kahina me suit toujours avec son téléphone
à la main. Je commence à courir pour quitter le parking, mais ça remonte tout de suite donc je remarche à bon rythme.

Quelques centaines de mètres de route, je bifurque pour entrer sur le chemin. J’arrive a courir un peu sur le chemin. C’est du chemin tourbé ça passe bien. Je trottine. Et puis j’arrive sur du
pierrier. De gros cailloux qui font des escaliers, des pierres qui roulent une pente de plus en plus importante. Je recommence à marcher. On est 3 sur le chemin à quelques mètres d’intervalle.

Physiquement, ça tire un peu dans les cuisses mais ça va. J’ai du peps. Je sais que je vais avoir presque 4km de marche jusqu’au sommet donc j’envoie un message a Kahina pour prévenir que ça va être plus long que prévu. Elle me rassure, ils sont prêts m’attendre.

Je grogne quand même. Ce n’est pas ma vision du triathlon ce chemin. Il faut être traileur, et un bon traileur pour avancer sur ce chemin très technique, surtout qu’il fait nuit maintenant.

J’arrive en haut, petite clairière avec un organisateur qui compte les passages. Je prends un peu de temps pour manger et discuter. Je regarde le chemin de redescente et c’est encore du sentier. Un autre participant arrive. Il est sur son deuxième tour. Il m’annonce que c’est encore au moins 5km de pierrier et de chemin accidenté. Impossible de courir pendant encore 5Km. Cumulé avec la montée, ça va me faire la moitié du parcours impossible à courir. En plus je n’ai ni l’entrainement, ni les chaussures pour faire de la descente dans ces conditions. Je suis très énervé que le descriptif du parcours ne précise pas cette difficulté.

Dans ma tête c’est le bordel. Je refuse d’abandonner, mais je n’ai pas envie de continuer. Je ne me vois pas faire la moitié du marathon sans avoir la possibilité de courir. Je ne suis pas venu
pour faire une rando !

J’envoie un message à Sandra. Elle seule peut m’orienter pour prendre une décision.

Voilà la décision est prise, je n’irai pas plus loin sur cette mascarade d’épreuve. Moi j’étais venu faire un iron-man. Extrême, certes, mais pas à ce point là. Un iron-man ça se court autant que possible. Surtout que j’ai les jambes. Je n’ai pas de problèmes au système digestif. Physiquement, je suis capable. Mais je refuse de continuer cette farce.

J’envoi des messages a Sandra et a Kahina, pour annoncer que je redescend, mais par le chemin de montée pour ne pas prendre la fin de la boucle qui fait 15Km.

Je râle en descendant, je ripe, glisse sur les cailloux, me perd et constate que le balisage est clairement foireux. Je mets quasiment une heure à redescendre. Non clairement, je ne suis pas venu pour ça.

En bas je retrouve mes accompagnateurs. Je suis résigné mais pas frustré. Enervé mais pas déçu.

Je vais récupérer mes affaires dans le gymnase. Je récupère mon vélo au parc. L’organisateur qui est là me dit qu’il vaut mieux ne pas laisser le compteur sur le vélo, qu’il pourrait se faire voler. J’explose dans ma tête « mais bordel vous servez a quoi si tout le monde peut venir et piquer du matos ! » Je rends les puces et sors du gymnase. Je ne suis pas épuisé, musculairement je suis bien. Juste soulagé.

L’histoire retiendra que ce soir-là, je suis resté encore quelques heures à discuter sur la terrasse du mobile-home en buvant des bières et en mangeant de la pizza. Et c’était bien. Je ne ruminais plus, je n’étais pas chamboulé comme je pouvais l’être il y a deux ans. J’ai pris une décision, pas parce que mon corp ne pouvait plus. Juste parce que je n’avais plus envie d’être là, de participer à cette parodie d’organisation.

Merci à la famille du sud (que je ne vois pas assez) d’être venus ambiancer la course. Merci pour les photos, les snickers et les sandwichs ! Merci à mes parents (que je ne vois pas assez non plus) de continuer à m’accompagner dans mes délires.

Je ne pouvais pas finir sans penser à Christine, Marraine et Sandra qui doivent se dire après avoir lu ce texte « mais je lui avait dit à ce bourriquot que cette course, il ne fallait pas la faire ». Vous aviez raison et c’est peut-être le seul regret que j’ai aujourd’hui. En ayant un full tous les deux ans, j’aurais dû choisir une course plus « normale » sur laquelle j’aurais pu être certain d’avoir une organisation fiable.

Mais ce sera mon seul regret, car pour préparer cette course j’ai repoussé plus loin mes limites, mis en place des mécanismes d’entrainement que je n’avais jamais essayé. Optimisé mes parcours comme je ne l’avais jamais fait. Amélioré ma nutrition, ma récupération… Une course, ce n’est pas seulement entre le départ et l’arrivée, c’est tout ce que j’apprends pendant la préparation et tous ces moments partagés lors du déplacement et après quand je raconte mes drôles d’histoires.

2 Commentsto Sans regrets

  1. Raf Vador dit :

    « ALLEZ TON TON !!!! » Mais pas trop vite !! La DSR est dans les parages 😉

  2. DS dit :

    Bravo David …
    Nous on t accorde la médaille du mérite..!!
    reportage tres instructif sur les carences de l organisation !!
    Mention trés bien à « la gamine « qui a su nous faire partager son enthousiasme …

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